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Altérité et spatialité. La géophilosophie pensante.

 

Introduction :

   De l’espace matériel à l’espace conceptuel c’est tout un saut qu’opère la pensée. L’Histoire n’a de fondement qu’un temps plié sur l’espace et qui se replie sur lui-même dans un mouvement continuel. La vérité scientifique ne fait que prouver cette thèse en affirmant que l’espace-temps est une donnée déterminante dans la durée du cosmos. Mais penser la spatialité résonne comme un rythme flouant la pensée dans sa démesure.

   Hannah Arendt donnait à ce concept (spatialité) une certaine importance, dans le sens où il est le fondement même de toute mouvance humaine. La spatialité dépasse le cadre dans lequel s’insère l’individu et/ou l’animal. Elle est mouvement et une dynamique territoriale que par laquelle l’Homme accède à une certaine géographie mouvante et non statique. La géophilosophie opère dans des dynamiques et des vitesses intensives, et dans le dépassement du simple habitat, pensif qu’il soit ou matériel. La maison-cosmos, selon Gilles Deleuze est ce que l’universel doit à l’Homme. Quelque chose tire l’Homme dans le chaos. Dans cette conception philosophique de l’espace l’étendu reste l’ouvert sur une dynamique inconsciente des fois, mais consciente et volontaire également. « Fuir la terre pour l’univers », et « fuir le monde pour le Moi »1, constitue deux mouvements identificateurs d’une vérité de l’Homme face à sa propre condition. Mais fuir, n’est en réalité qu’une recherche en soi impliquant des spatialités imbriquées les unes dans les autres. L’Autre se présente dans cette perspective comme assurant une altérité refoulée et assurant d’une manière inconsciente le maintien d’un processus en marche.

I. La spatialité comme condition 

   Ce que l’espace peut constituer pour l’Homme ne peut être défini que par rapport à la condition existentielle auquel il est assigné. La notion de spatialité, qui englobe chez Arendt tout ce qui peut se rattacher de près ou de loin à l’espace comme concept fondateur, identifie la condition humaine comme rapport à une terre, un territoire et à un espace, en affirmant que : « La Terre est la quintessence même de la condition humaine »2, mais essentiellement comme identifiant et édifiant une genèse de son propre Être dans le monde. Errer dans le monde c’est parcourir des distances, c’est envahir, convoiter et transformer le milieu ou l’espace rencontré, telle fût l’entreprise de l’Homme en essayant de plier la terre à la condition de leur survivance et de leur existence, « les hommes sont des êtres conditionnés parce que tout ce qu’ils rencontrent se change immédiatement en condition de leur existence »3. De cette idée, nous pouvons pointer un premier axe de réflexion engageant une dialectique entre l’humain et l’espace qu’il transforme. Une condition première pour son expansion. Mais la problématique

1 Hannah Arendt. 1992, Condition de l’homme moderne, Paris, Pocket [traduction de The Human Condition, London, Chicago, University of Chicago Press, 1958 ; première traduction française en 1961]

2 Idem

3 Idem

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que cela soulève trouve son sens dans ce qu’Arendt nommait comme lieu, dont la référence aristotélicienne en constitue le fondement, à savoir « la place (location) de l’un ne coïncide pas plus avec la place (location) d’un autre que deux objets ne peuvent coïncider dans l’espace »4. C’est dans cette articulation que le débat peut s’élargir. Ce que l’autre est à son espace, le moi ne l’est que dans la condition d’en être différent. La différence est le principe fondamental qui sépare l’individu de l’autre. Selon Levinas « L’altérité n’appartient pas à l’ordre des objets, je ne peux la faire mienne. L’Autre est et demeure un mystère, comme ce qui m’échappe toujours, je ne peux le saisir tel un objet, il n’est pas un autre moi, mais un Autre que Moi »5 . Cette vision qui parait pessimiste ou grotesque pour certain, ne l’est pas pour autant. Elle parait peut-être contraire même à ce que l’on croit, dans le sens où saisir une définition de l’autre ne peut avoir de signifiance que dans cette approche universaliste et absolue de l’autre. Les réflexions de Levinas dressent une sorte de procès contre la pensée philosophique occidentale qui essayait de particulariser l’universalité de l’homme et par là celle de l’autre, dans le sens où exister ensemble constitue un moment crucial qui contrecarre l’idée de l’Être, « C’est donc l’être en moi, le fait que j’existe, mon exister qui constitue l’élément absolument intransitif, quelque chose sans intentionnalité, sans rapport. On peut tout échanger entre êtres sauf l’exister. Dans ce sens, être, c’est isoler par l’exister »6. Cela pose une nouvelle dialectique qui nous plonge dans la vision complexe de soi à soi-même et de l’Être à l’existant comme étant une relation double et unique à la fois, « l’exister n’a pas de point de départ. C’est ici, dans cet il y a que se produit l’hypostase ; hypostase comme moment où l’existant se met en rapport avec l’exister. L’exister devient l’attribut de l’existant, et c’est par cette « maîtrise jalouse et sans partage » sur l’exister que l’existant est seul »7 . C’est de cette solitude profondément ancrée dans l’Être que le rapport au monde demeure problématique et problématisant. Problématisant la réalité individuée de l’homme dans sa dualité existant-exister.

   La condition humaine construit avec l’espace un lien étroitement intrinsèque, dans le sens où dénaturer la nature demeure une entreprise souvent rattachée au développement croissant de l’habitat comme constituante du projet humain dans sa relation avec l’autre et avec le monde qu’il plie à sa volonté de s’étendre. Hannah Arendt identifie une catégorie du rapport de l’Être au monde en élaborant la notion de maison terrestre, qui selon elle « ne devient un monde, au sens propre du terme, que lorsque la totalité des objets fabriqués est organisée au point de résister au procès de consommation nécessaire à la vie des gens qui y demeurent, et ainsi, de leur survivre »8 . L’Homo Faber, tel que le définissait Bergson et par la suite traité par Arendt, constitue l’unique réalité de l’Humain dans son rapport et au temps et à l’espace. L’homme est ce qu’il fabrique. De la maison terrestre au monde, le saut est à la fois quantitatif et qualitatif. Fabriquer un monde doit passer essentiellement et selon les dires d’Arendt par l’ensemble d’artefacts qui vont constituer le médiateur entre la condition naturelle de l’homme et la condition à laquelle il tend. C’est ainsi et dans ce mouvement translatif qu’Arendt parlait également de l’action, qui selon elle, « est la seule activité qui mette directement en rapport les

4 Idem

5 Levinas Emmanuel. Totalité et infini. France. Edition Folio. P 185.

6 Idem

7 Idem

8 Hannah Arendt. 1992, Condition de l’homme moderne, Paris, Pocket [traduction de The Human Condition, London, Chicago, University of Chicago Press, 1958 ; première traduction française en 1961]

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hommes »9, dans ce qu’elle nommait espace de l’action. Cet agir doit prendre un sens élargi du verbe. L’autre est ainsi conditionné par la même dynamique, qui l’identifie en tant que tel : Un Être de l’action. Parler est l’acte primaire de tout humain. Parler à l’autre constitue ce qui s’identifie le plus à l’homme comme doué d’une faculté qui l’engage dans la différence de l’autre par le biais de cet acte communicationnel. L’espace de cette action se définit à partir d’une diversité fondamentale. La perception du monde des objets diffère en effet d’un individu à un autre. C’est dans cette condition unique où l’espace actif ou espace de l’action peut prendre forme. Mais c’est dans l’apparence des choses que le nœud se serre encore plus, dans le sens où cette dernière s’insère dans la logique de l’interprétation qui diffère fondamentalement et d’une manière essentielle d’un individu à un autre. Cet espace de l’apparence dont la parole constitue une pierre d’angle détermine une spatialité qui se sert d’une différence pour continuer d’être. Passer dans l’action et/ou dans la parole c’est se placer essentiellement à la pointe de sa différence. Une différence élémentaire qui s’extrait de l’apparence, et c’est dans cette élan que « l’espace de l’apparence commence à exister dès que des hommes s’assemblent dans le mode de la parole et de l’action »10 .

II. La géophilosophie et l’Être 

   L’Homme accède à sa propre condition d’existant par le biais des forces qu’il applique au territoire qui le détermine en tant qu’Être territorial. « Penser se fait plutôt dans le rapport du territoire et de la terre »11. La réflexion deleuzienne soulève une problématique qui nous parait importante, dans le sens où elle implique un rapport et un mouvement. C’est dans cette même perspective que Stock parlait de « faire avec de l’espace au lieu d’être dans l’espace »12. Composer également avec l’espace c’est recréer ses propres conditions existentielles. Heidegger avançait un concept qui demeure aujourd’hui au sein du comité scientifique une idée fondamentale dans la pensée de l’Être et dans son rapport au territoire et / ou à la terre, à savoir « l’Habiter »13. Pour ce dernier « habiter pour l’être-là, c’est donc se construire à l’intérieur d’un monde par la construction même de celui-ci »14 . Cette idée de construction constructiviste du monde ou des mondes nous plonge par ailleurs dans une vision assez confuse du concept habiter. Ce que la pensée heideggérienne défende comme fondement premier de l’Être cache en réalité une autre vérité plus essentielle, à savoir le déplacement ou le mouvement de l’Être dans sa capacité à étendre les limites propres de son espace. Sa manière d’être au monde implique une vision plus étendue, de point de vue les déplacements effectués pour en assurer l’existence. Se déplacer et se mouvoir identifie une qualité de l’Être dans sa relation au monde qu’il perçoit et qu’il parcoure en le transformant. Husserl affirmait l’idée de ce transformisme en insistant sur la perception relativiste de l’Être au monde comme entité relative aux choses et aux autres. Le rapport de l’Être au monde est loin d’être un rapport d’ancrage ou d’arrêt, mais

9 Idem

10 Idem

11 Deleuze gilles. Qu’est-ce que la philosophie ? Edition Cérès. P 94

12 STOCK Mathis., 2004, “ L’habiter comme pratique des lieux ”, Espacestemps.net, Textuel, 18.12.2004 (http://www.espacestemps.net/document1138.html)

13 Heidegger Martin. « Heidegger et la question de l’habiter par Bonicco-Donato Celin

14 Idem

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plutôt un rapport engagé dans un processus mobile et dynamique. C’est dans ce sens précis où l’ici demeure relatif. Par le simple mouvement du corps, « je transforme un là en ici »15.

   La question de l’Être persiste chaque fois qu’on l’engage dans un rapport immédiat au monde. En effet, c’est en étant nomade que le voyage s’arrête. Ce qui détermine l’objectif du nomade n’est pas la terre qu’il quitte, mais celle qu’il convoite. Son mouvement et son dynamisme détermine une potentialité problématique, dans le sens où il marque une rupture-mobile. L’Être au monde du nomade conditionne sa mobilité, dans le sens où « Il ne suffit certes pas de voyager pour échapper au fantasme »16. Le nomadisme intellectuel, tel que le définit Deleuze trouve son origine dans le rapport du centre à la périphérie et de la périphérie au centre. Les mouvements nomadiques physiques s’éloignent en qualité des mouvements nomadiques intellectuels, dans un sens où la problématique essentielle soulevée par les uns diffère de celle soulevée par les autres.

   A la question de la pensée du dehors, Kenneth White affirmait que le nomadisme géographique et intellectuel ouvre l’accès à des possibilités qui peuvent nourrir le manque ou encore le refoulé de la civilisation occidentale (pour lui la civilisation celte). C’est sur ce point que l’altercation entre lui et Deleuze prenait forme. La réflexion développée par Deleuze, moins que provocatrice, demeure essentielle, dans le sens où elle problématise ce que le poète écossais croyait voir juste. C’est dans la dialectique du manque que l’écart prenait forme. Ce que Deleuze pointait comme point fondamental dont il faudrait prendre conscience, c’est la peur de tomber dans l’aberration raciale ou le racisme, fascisme et toute forme d’exagération du thème de la race. Sa question fût importante au moment même où White essayait de trouver d’autres solutions de cohabitation. «Comment faire pour que le thème d’une race ne tourne pas au racisme, en fascisme dominant et englobant, ou plus simplement en aristocratisme, ou bien en secte et folklore, en micro-fascisme »17 Ce questionnement d’ordre philosophique mais essentiellement ethnique affirme une vérité, qui loin d’être moindre, dévoile un sens beaucoup plus profond à la relation qui puisse s’établir comme Deleuze l’indiquait un peu plus loin entre la tribu-race ( les celtes) et l’espace-milieu ( l’orient, le désert..). Cette relation remplie de tant d’ambigüité et de complexité n’est pas d’un ordre sentimental ou fantasmatique. Elle est d’une réalité brutale et fulgurante qui dépasse même le sens de la satisfaction pointé par White. Ce que Deleuze craignait, c’est qu’il puisse se développer chez White une certaine dérive mentale et surtout socio-politique, émanant de sa manière de percevoir dans la complémentarité dissymétrique entre l’orient et le celte une hégémonie des cultures dites celtes.

   Dans ce même mouvement et pour revenir à la question du rapport entre la périphérie et le centre, nous évoquons ici le commentaire élaboré par Deleuze dans le chapitre Géophilosophie18 s’intéressant à la conception territoriale de la philosophie de l’occident : « Ce qui reste commun à Heidegger et à Hegel, c’est d’avoir conçu le rapport de la Grèce et de la philosophie comme une origine, et ainsi comme le point de départ d’une histoire intérieure à l’occident, telle que la philosophie se confond nécessairement avec sa propre histoire. Si fort

15 Husserl. Edmund. Méditations cartésiennes. 2dition Harmattan. P 145

16 Deleuze Gilles. Milles plateaux. Éditions Lharmattan. P 25

17 Idem

18 Deleuze Gilles. Qu’est-ce que la philosophie ?. Edition Cérès. P 105

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qu’il s’en soit rapproché, Heidegger trahit le mouvement de la déterritorialisation, parce qu’il le fige une fois pour toutes entre l’être et l’étant, entre le territoire grec et la terre occidentale »19. La nature figée de l’origine ne fait que tourner en cercle, dans une espèce de circuit fermé. La Grèce philosophique dépend de sa propre question, de sa forme pré-existentielle, dans le sens où elle se plie non seulement à la géographie comme ensemble de repères ou de coordonnées spatiales, mais en tant que géographie mentale. Ce que Deleuze reprochait à Heidegger, c’est sa manière de s’attacher à l’histoire de la philosophie comme étant un élément de la Grèce. Elle est grecque ou ne l’est pas. C’est, au contraire, dans le devenir non historique de la Grèce que la philosophie peut être capable d’engendrer ses propres concepts, en retombant sur la terre réunissant comme horizon sur lequel se projetterait la transcendance verticale. Le mouvement est la condition nécessaire au développement du concept, qui par l’opération de son propre devenir puisse s’accrocher à la terre et par là au territoire dont il émane et y retourne. Plutôt géographique qu’historique, le mouvement de la pensée opère des sauts. Nietzche associait la philosophie grecque non pas à une origine, mais plutôt à un milieu, une ambiance. Et si elle avait pu survivre, c’est parce qu’elle était capable de s’émanciper de la terre dont elle dépendait. C’est par la fin de la Grèce que la philosophie grecque avait pu survivre. C’est en se déterritorialisant que son propre être s’était formé. C’est dans ce même élan que tout mouvement et toute dynamique de l’occident s’était opérée : capitalisme, fascisme, racisme. Conquérir de nouveaux territoires tout en se construisant une Europe nouvelle, émanant d’une terre d’origine, d’une pensée originelle. S’extérioriser, se déterritorialiser en dehors, toujours en dehors de ses propres limites, au moment où l’Orient empêche la propagation des foyers d’immanence20. Comme le pointait Primo Lévi en essayant de comprendre le système capitaliste et les différentes combinaisons qui le géraient, en s’exclamant par cette phrase : « la honte d’être un homme »21, à quoi Deleuze répondait : « Ce sentiment de honte est l’un des plus puissants motifs de la philosophie. Et il n’y’a pas d’autre moyen que de faire l’animal (grogner, fouir, ricaner, se convulser) pour échapper à l’ignoble ».22 La rage animalière s’empare de la pensée humaine en travestissant le mal en un cri de droit absolu et non relatif-démocratisé. Les territoires s’intériorisent dans une espèce d’entourloupe géante, absorbant dans son mouvement toute humanité. Nous assistons aujourd’hui à une mort imminente de l’homme et la célébration démultipliée de la cité-état et d’une démocratie qui conditionne toute périphérie à la mécanique du bidonville universel. Il nous reste la puissance de l’idée. Cette force implacable qui est « plus proche d’un animal qui meurt, que d’un homme qui vit, même démocrate »23.

Conclusion 

   Dans cet article nous avons essayé de traiter la question de l’altérité tout en la soumettant à des réflexions et des approches complexes afin de déterrer les éléments de fond qui la maintiennent, aujourd’hui encore dans une certaine problématique.

19 Idem

20 Idem

21 Lévi Primo. La tragédie d’un optimiste. Edition folio. P 125

22 Deleuze Gilles. Qu’est ce que la philosophie ?. Edition Cérès. P 121

23 Idem

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   Nous étions dans la nécessité d’aborder des concepts basiques afin de pouvoir comprendre la structuration conceptuelle des causes primaires et des effets conduisant nos sociétés modernes à poser la question de l’autre. Il fallait s’étaler sur les interrogations traitées par des penseurs et des philosophes, dont l’importance nous paraissait urgente. Cela demandait une fouille méticuleuse pour pouvoir trouver des zones de rencontre dans lesquelles nous avions pu installer notre système réflexif.

   La première partie s’intéressait au concept de spatialité qui fut développé par Hannah Arendt, dans sa relation avec la condition humaine. Afin de problématiser cette idée fondamentale de l’auteur, il nous était nécessaire de la développer en la soumettant à des points de vue variés, maintenant ainsi notre système de réflexion à une dialectique. Levinas constituait l’autre bout de cette dialectique qui nous avait permis de cerner notre questionnement primaire. En effet, la question de l’Être, de l’autre et de l’espace, nous avait permis d’aboutir non pas à une conclusion, mais plutôt à la mise en lumière d’un état de monde. Cette double vision de l’altérité permettait de dégager une réalité double de l’Être en soi et de l’Être au monde, dans un sens opposé et grotesque. Levinas maintenait l’idée de l’Être comme incapacité d’échapper à sa propre condition d’étant, matérialisée selon lui dans la solitude. Ce qui s’opposait catégoriquement avec la pensée d’Arendt, selon qui le projet humain est un projet qui vise l’autre dans un rapport médiatisé par l’espace qu’il transforme. Ce qui détermine l’être ou l’homme dans sa condition est sa manière d’être en action, et la parole comme action différentielle mais visant l’autre dans sa différence propre.

   La deuxième partie soulevait une problématique beaucoup plus complexe en s’appuyant sur le concept de géophilosophie de Gilles Deleuze tout en le confrontant avec d’autres réflexions philosophiques, essentiellement d’Heidegger, Husserl et Kenneth White. La question de l’Être traitée par le philosophe allemand était essentielle dans cette réflexion, afin de pouvoir saisir les variances que ce concept soulevait. L’être mais aussi l’habiter, constituaient deux articulations importantes dans le développement de notre pensée. Cela nous avait conduit à des constatations essentielles à la compréhension de la problématique qu’on avait soulevé au départ. En effet, la mobilité et le dynamisme demeurent des intensités qualitatives-quantitatives déterminant le rapport de l’être à la terre et au territoire qu’il déterritorialise. Cette réflexion régie par la géophilosophie, détermine une réalité empirique que certains penseurs négligeaient où pire encore engageaient dans un processus à effet nuisant. La dynamique et le mouvement du centre à la périphérie définit une réalité complexe que l’occident investit tout en éliment la terre du territoire qu’il déplace et de la terre le territoire qu’il plie.

   Dans cet article, nous avons essayé de secouer le système qui traite l’altérité comme solution, tout en reniant la systémique de fond qui gère en vérité les forces obscures faisant de l’être un Être de périphérie décentralisé par rapport à son universalité absolue.

Youssef Mohamed Ali​

Enseignant chercheur à l’institut supérieur des beaux-arts de Nabeul (Tunisie-Université de Carthage).

Thèse de doctorat : Sémio-esthétique de la bande dessinée. Séquentialité narrative et spatialisation graphique de l'Image. 

Champs de recherche : Littérature, art et philosophie.

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